Seul territoire dépourvu de CHU, notre île enregistre plus de 26 000 déplacements chaque année. Cette problématique spécifique à la Corse concerne toutes les familles.
Ces départs contraints entrainent de nombreuses difficultés logistiques et financières qui constituent une double peine qui vient s’ajouter à la maladie. Elles entrainent une forme d’inégalité en matière d’accès aux soins, des ruptures du parcours de soins et des phénomènes de renoncement.
En l’état actuel des choses, les textes qui régissent la prise en charge des déplacements médicaux relèvent du droit commun. Ils s’appliquent donc uniformément sur tout le territoire national sans que la prise en compte de notre spécificité sanitaire soit possible.
Ces règles sont restrictives. Elles se limitent aux frais de transport, en excluant ceux qui sont liés à l’hébergement, et elles sont limitées à certains cas. Le plus symbolique d’entre eux étant la prise en charge d’un seul des deux parents d’un enfant lorsqu’il doit partir sur le continent.
Le combat pour la prise en charge du 2nd accompagnateur d’un enfant malade
Depuis de nombreuses années l’Association INSEME se bat contre cette injustice avec les familles.
Il a été établi que seulement 3 004 déplacements concernent des enfants chaque année, soit 12% de la totalité des flux. En outre ces chiffres n’ont pas tendance à augmenter. Ils se maintiennent au même niveau depuis 10 ans.
Pour autant, que l’enfant soit né grand prématuré et doive rester plusieurs mois en couveuse à Marseille ou à Nice ; qu’il souffre d’un cancer qui nécessite un traitement allant parfois au-delà de douze mois ; voire même qu’il soit hospitalisé en fin de vie ; jamais les textes qui régissent les prises en charge de l’Assurance Maladie ne permettent à son deuxième parent de se rendre à son chevet. Cela nous est insupportable.
Ce combat, a été approfondi par les travaux du Conseil Economique Social Culturel et Environnemental de Corse, qui a élaboré en septembre 2018 un rapport et 10 propositions destinées à « Innover pour supprimer les inégalités territoriales ».
Il fait consensus depuis longtemps au sein de la société insulaire et des Conseils des CPAM et MSA de Corse.
Il a également été repris par l’ensemble des acteurs de la classe politique via un projet de loi déposé par les quatre Députés insulaires en octobre 2018 et par un vote à l’unanimité de l’Assemblée de Corse en décembre 2018.
L’engagement d’Agnès Buzyn, une avancée considérable
Une avancée considérable a été réalisée sous l’impulsion de Mme Agnès Buzyn alors Ministre de la Santé et des Solidarités.
En présence de plusieurs familles et par voie de presse dans une interview accordée à Corse-Matin en date du 27 mai 2019 elle avait en effet annoncé sa décision d’accorder la prise en charge du second accompagnateur d’un enfant.
Une conférence de presse organisée par la Préfète de Corse Mme Josiane Chevalier le 6 novembre 2019 confirmait la parution à venir, en janvier 2020, d’un décret venant consacrer ce nouveau droit.
Depuis juillet 2019, à la demande de Mme Buzyn, à titre dérogatoire et transitoire, dans l’attente du décret, les CPAM et la MSA de Corse ont mis en place le remboursement de ces billets via leurs fonds d’action sanitaire et sociale.
Ce dispositif extra-légal, s’il a le mérite d’exister, entraine toutefois beaucoup de renoncement. En effet, les familles doivent acheter leur billet puis constituer un dossier de demande de remboursement auprès des Commission des Caisses. Il convient de signaler en outre que les budgets de ces commissions ne sont pas garantis d’une année sur l’autre et sont très limités.
Seule la parution d’un décret faisant de cette prise en charge une nouvelle prestation légale (sans condition) financée sur le budget général de l’Assurance maladie permettra de garantir ce droit.
L’annonce restrictive du Président de la République
A l’occasion de sa venue en Corse le 9 septembre dernier, le Président de la République a annoncé la parution imminente, avant la fin du mois de septembre, du décret tant attendu.
Suite à sa conférence de presse, la satisfaction des familles a malheureusement été limitée puisque nous avons appris que le décret concernerait uniquement les mineurs de moins de 16 ans hospitalisés sur le continent ou en Affection de Longue Durée (ALD).
L’engagement de Mme Agnès Buzyn ne sera donc pas mis en œuvre dans sa totalité. Elle s’était prononcée publiquement pour la prise en charge du second accompagnateur de tout mineur. Il s’agissait de créer un droit général permettant à tout enfant ne pouvant être soigné en Corse d’avoir ses deux parents à ses côtés. En effet, elle avait convenu avec nous que les familles ne sont pas responsables de l’absence d’infrastructure dans leur région et que la totalité des déplacements de ces enfants est jugée indispensable par le corps médical, qu’il y ait ou pas une hospitalisation et qu’il s’agisse ou pas d’une ALD. En effet, ces flux ne sont effectués que sur prescription d’un médecin qui établit la demande d’accord préalable avant le déplacement et après validation par le Médecin conseil des Caisses d’Assurance Maladie.
Force est de constater que nous sommes donc en deçà de l’engagement qui a été pris. Bien qu’une grande partie des déplacements soient concernés, la totalité des cas ne sera donc pas traitée. Concrètement certaines familles devront encore subir des difficultés importantes. (Ex : un enfant de 16 ans qui a un accident grave en moto, un enfant suivi sur le continent car la spécialité n’existe pas en Corse même s’il n’est pas en ALD etc…). Si leur cas pourra toujours être traité via les Commissions d’Action Sanitaire et Sociale des CPAM et de la MSA, les familles seront soumises aux même difficultés que celles actuellement rencontrées et les budgets concernés resteront précaires.
L’appel des familles à la mobilisation le 28-09-20
Les familles ont lancé un appel à la mobilisation ce lundi 28 septembre à 17h devant la Préfecture d’Ajaccio pour réclamer que tous les enfants qui sont dans l’obligation de partir sur le continent puissent bénéficier du droit à la prise en charge du 2nd accompagnateur.
Nous nous associons à cette démarche et serons aux côtés des parents pour réclamer que l’engagement pris publiquement par la Ministre Agnès Buzyn en mai 2019 soit respecté en totalité.
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